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La malveillance, une histoire de manque
Conférence de Pierre Janin aux Journées Bienveillance
le 6 octobre 2012 au Creuset de Meymans
1ère partie. Retour sur le mot Bienveillance
Pour commencer, je voudrais préciser comment j’emploie le mot bienveillance. Son étymologie est le latin bene volens, bon vouloir, il s’agit donc de veiller au bien, de vouloir le bien, le bonheur d’autrui.
Pour beaucoup de gens, en tout cas ici en France, le mot véhicule une certaine connotation condescendante de supérieur à inférieur, connotation héritée je pense de nombreux siècles de prééminence de l’Eglise. Je rappelle ici que l’Eglise catholique a explicitement interdit de lire la Bible au concile de Toulouse en 1229, et qu’au concile de Trente, trois siècles plus tard, qui s’étendit sur 18 années (1542-1563) il fut précisé ceci :
« Pour arrêter et contenir les esprits agressifs… le Concile ordonne que… personne, se confiant en son propre jugement, n'ait l'audace de tirer l'Écriture sainte à son sens particulier, ou de lui donner des interprétations contraires à celles que lui donne et lui a données la Sainte Mère l'Église à qui il appartient de juger du véritable sens et de la véritable interprétation des Saintes Écritures… Les contrevenants seront soumis aux peines fixées par le droit. »
Et encore :
« Nous confessons que l'Écriture sainte est imparfaite et lettre morte tant que le Souverain Pontife ne l'a pas expliquée et n'en a pas permis la lecture aux laïques ».
Et voici encore le conseil des cardinaux au nouveau pape Jules III lors de son élection en 1550 : « La lecture de l'Evangile ne doit être permise que le moins possible surtout en langue moderne… Le très peu qui est lu généralement à la messe devrait suffire et il faudrait défendre à quiconque d'en lire plus. » Je rappelle ici qu’au moment du Concile de Trente, Luther avait déjà traduit la Bible en allemand pour la rendre accessible à tous ; il affirmait que la religion ne pouvait en aucun cas être dictée par le pouvoir en place, et que la Bible était la seule autorité spirituelle. Il avait été bien sûr excommunié (1521).
Les prêtres catholiques, soumis à l’autorité des évêques et ceux-ci à celle du Pape, ont donc eu très longtemps la fonction de veiller sur les âmes de paroissiens déclarés moins éclairés, moins spirituellement armés pour se défendre les tentations du démon. « Je prierai pour vous, mon fils, ma fille. Si je vous prescris ou vous interdis ceci ou cela, c’est pour votre bien. Je sais mieux que vous ce qui est bien pour vous, je vous veux du bien, je suis bienveillant. »
Avec ce rétrécissement infantilisant du mot bienveillance, je ne suis pas d’accord du tout : il l’ampute de sa dimension large, qui est en même temps vouloir du bien, veiller au bien, être accueillant, respectueux, concerné, solidaire, se sentir du même bord que l’autre même s’il est différent… une disposition favorable à ce qui est soit en moi-même, soit autour de moi : les choses, les gens, la nature, le monde, l’univers… Etre bienveillant, c’est être « en faveur de », attentif à ce qui est possible dans le sens de meilleur, bref c’est être POUR. J’adhère tout naturellement au sens que lui donnent les bouddhistes : ceux-ci laissent à chacun la tâche de trouver, avec l’accompagnement des enseignants qu’il aura choisis (et non pas ceux qu’on lui aura imposés), son chemin vers l’éveil, et ils ont déjà donné son nom de Bouddha à celui qui doit, selon eux, prendre la suite du Bouddha historique, de son nom personnel Siddharta Gautama : ce successeur sera Maitreya, ce qui veut dire le Bienveillant. De son côté, à peu près à la même époque que Gautama, il y a 2500 ans, Confucius disait : la bienveillance fait l’homme.
J’imagine volontiers que chacun ici a l’expérience d’avoir été bienveillant dans ce sens large : d’avoir voulu du bien, veillé au bien, travaillé au bonheur, de s’être senti concerné et solidaire d’une ou de plusieurs autres personnes ; et chacun a aussi, je suppose, l’expérience d’avoir reçu de la bienveillance d’une ou de plusieurs autres personnes. Et j’imagine enfin que tous, nous avons pu mesurer que la bienveillance, donnée ou reçue, a des degrés : elle peut aller de la gentillesse passagère jusqu’à un engagement total de l’être sur des bases intérieures fermes et durables.
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